Présidentielle : <br>et les déserts médicaux

Présidentielle :
et les déserts médicaux

24 mars 2022

La santé est, avec le pouvoir d'achat, la principale préoccupation des Français. Mais cette fois encore, elle reste la grande oubliée des débats de la présidentielle. Hôpitaux publics en manque de moyens, pénurie de médecins, Sécurité sociale sous financée… Les inquiétudes sont pourtant nombreuses.

La Mutuelle Familiale a réuni cinq experts pour leur demander quels sont les chantiers prioritaires à mettre en œuvre. Pour Pierre Micheletti, médecin et président d'Action contre la faim, l'urgence est de faire disparaitre les déserts médicaux.

Les centres de santé doivent se développer sur tout le territoire

En pleine pandémie, le zoom a été mis sur l'hôpital.

Mais pendant ce temps, les inégalités territoriales ont continué de s'accroitre. La pénurie de médecins dans de nombreux territoires est très préoccupante. Et les inquiétudes touchent tout autant les quartiers des villes dits sensibles que le milieu rural isolé. Dans les prochaines années, la France continuera à être confrontée à une situation très difficile si l'on ne prend pas des mesures fortes dans le prochain quinquennat. Par exemple, pour mieux répartir l'offre de soins, il faudrait réguler les installations dans les zones surpeuplées médicalement, comme on le fait pour les pharmacies d'officine.

Contraindre le lieu d'installation n'est pas la solution

Mais mesures fortes ne veut pas dire mesures contraignantes. Je ne suis pas favorable, comme le proposent certains candidats, au fait d'imposer le lieu de leur installation aux jeunes médecins libéraux. C'est un peu comme si on leur disait : ≪ Vous en prenez pour quarante ans ! ≫ Les étudiants ont besoin de savoir à quelle réalité ils vont se confronter dans leur pratique. Pour cela, il faut les informer, tout au long de leur cursus, sur la précarité rurale et les zones urbaines défavorisées. Dès le deuxième cycle des études de médecine, on doit leur apporter des connaissances sur les inégalités sociales de santé et sur le rôle des médecins : la conscience sociale du sens de sa pratique est tout aussi importante que la performance scientifique et technique.

Anticiper le « turn-over »

Une mesure concrète serait d'anticiper le ≪ turn-over ≫ des jeunes médecins dans ces zones désertiques en organisant des rotations. Par exemple tous les trois ans. Aux agences régionales de sante (ARS) de définir les localités qui en ont le plus besoin. Les patients savent bien que le médecin de famille qui suivait plusieurs générations, disponible 24 heures sur 24, c'est fini ! La jeune génération n'est plus d'accord pour vivre la vie de nos anciens médecins de campagne, l'exercice libéral isolé de la médecine ne les attire plus. Les centres de sante pluri-professionnels doivent se développer. Cela permet une offre plus large aux patients et un enrichissement de la pratique pour les médecins.

Développer la télémédecine

La pandémie a permis de donner un coup d'accélérateur à la télémédecine avec les téléconsultations qui rendent bien des services. La médecine doit bien entendu rester une rencontre, mais le Covid-19 a prouvé l'efficacité de tels dispositifs. Enfin, pour aider les médecins dans leur pratique, l'idée serait aussi de donner plus d'importance aux nouveaux métiers comme les assistants médicaux et surtout d'accorder de nouvelles compétences aux infirmiers et aux sages-femmes.

Marilyn Perioli

Chiffres :

7,4 MILLIONS DE FRANÇAIS
vivent dans un désert médical
(Observatoire de la santé 2020 de la Mutualité Française)

6 à 8 MILLIONS DE FRANÇAIS
n'ont plus de médecin référent
(rapport d'information des sénateurs Hervé Maurey et Jean- François Longeot, 2021).

 

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 A venir, l'interview de Gilles Pérole